Pratiques managériales : une situation particulière du management « à la française » ?

À l’heure où les entreprises françaises font face à des défis RH majeurs tels que le recrutement et la rétention des talents, l’engagement des salariés, la productivité des collaborateurs ou encore les attentes croissantes de qualité de vie au travail, l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) vient de publier un rapport sans concession. Ce document exhaustif met en lumière les pratiques managériales actuelles en France, tout en proposant des pistes d’évolution inspirées de modèles européens éprouvés. 

 

Une analyse originale 

Le rapport IGAS, rendu public le 28 mars 2025, s’attache à analyser « les liens qui peuvent être établis entre les pratiques managériales et les politiques sociales, en comparant la situation de la France avec l’Allemagne, l’Italie, l’Irlande et la Suède ». 

Pour les rapporteurs, « les politiques managériales exercent une influence non seulement sur la qualité de vie au travail et les conditions de travail des salariés mais produisent également, outre un effet sur la performance des entreprises, des effets sur les politiques sociales que l’on peut mesurer via le taux d’emploi, recours au régime d’assurance maladie, absentéisme, sentiment de perte de sens au travail, etc. » 

Ils font également le constat « contre-intuitif » que les critères d’un management de qualité sont très convergents quel que soit le pays, le secteur d’activité ou la taille des entreprises. 

 

Un diagnostic sans appel 

Le rapport IGAS est clair : malgré quelques avancées ponctuelles, le management en France reste globalement marqué par une approche verticale et hiérarchique. Comparativement aux autres pays européens observés, ce constat se traduit concrètement par une autonomie plus faible des salariés, une reconnaissance du travail jugée insuffisante et un plus fort sentiment de perte de sens au travail. 

Selon les données recueillies, de nombreux collaborateurs se sentent peu impliqués dans les décisions qui affectent directement leur travail quotidien. L’absence d’une véritable participation opérationnelle ou organisationnelle freine leur motivation et leur capacité d’innovation. Le management à la française peine également à intégrer pleinement les nouvelles attentes générationnelles. 

Ce diagnostic se traduit par des indicateurs dégradés : taux élevé d’absentéisme, augmentation du turnover dans certains secteurs sensibles et faible satisfaction au travail pesant sur l’engagement des salariés et la qualité du travail. Autant de signaux d’alarme qui poussent à repenser profondément le modèle managérial existant. 

 

Vers un management participatif et responsabilisant 

L’IGAS identifie trois piliers fondamentaux pour définir un « bon management » : 

  • La participation des salariés, à la fois dans l’autonomie opérationnelle (prise d’initiative dans l’exécution des tâches) et organisationnelle (participation active aux décisions). 
  • La reconnaissance du travail, intégrant aussi bien une dimension financière qu’informelle, basée sur l’écoute, la valorisation et les perspectives d’évolution professionnelle. 
  • L’autonomie des collaborateurs, vecteur clé d’engagement et d’adaptabilité face aux changements économiques, technologiques et sociétaux actuels. 

 

Une nécessaire évolution culturelle et structurelle 

Pour réussir cette transformation, l’IGAS préconise des changements culturels profonds dans les entreprises françaises. Cela implique une remise en cause des structures traditionnelles de commandement et une évolution vers un modèle de leadership plus horizontal, où l’écoute et la confiance sont primordiales. 

L’environnement juridique et social doit également évoluer pour favoriser une plus grande intégration de ces principes au sein des organisations. Le rapport insiste particulièrement sur l’importance de réformer le cadre législatif actuel pour que les questions liées à la qualité du management soient explicitement intégrées dans les discussions et négociations sociales obligatoires. 

Enfin, la mission préconise des mesures en faveur de pratiques managériales positives en renforçant l’accompagnement des managers dans un contexte où ils subissent une importante pression, vers un management plus participatif et innovant. L’objectif étant de mettre les cadres et notamment les managers au centre des processus de transformation des organisations. 

 

Quelle formation pour les managers de demain ? 

Le rapport IGAS souligne particulièrement la nécessité d’une réforme en profondeur de la formation initiale et continue des managers. Les compétences techniques ne suffisent plus : il est essentiel que les managers développent des capacités solides en matière de leadership collaboratif, de communication transparente, d’écoute active et d’innovation managériale. 

La formation des managers devrait ainsi être repensée pour intégrer ces compétences humaines et relationnelles dès les premières années d’études supérieures, mais aussi tout au long de leur parcours professionnel. Des formations dédiées au dialogue social, à la résolution collaborative des problèmes, à la gestion des risques psychosociaux des membres de l’équipe, ainsi que des démarches innovantes privilégiant les apprentissages centrés sur un management plus coopératif et tourné vers la qualité de vie au travail. 

Par ailleurs, la formation continue des managers devrait s’appuyer sur des dispositifs individuels et collectifs tels que le coaching personnalisé, les échanges interprofessionnels ou encore des sessions de formation-action sur le terrain. Le rapport recommande aussi une meilleure intégration entre formations académiques et expériences professionnelles concrètes afin d’ancrer durablement ces nouvelles pratiques. 

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Les inspirations européennes : des modèles à suivre ? 

L’Allemagne et la Suède apparaissent dans le rapport comme des modèles exemplaires de codétermination et de participation active des salariés aux orientations stratégiques (cf. le programme allemand « future of work » en soutien à l’innovation managériale et à la qualité de vie au travail). L’Irlande et l’Italie, quant à elles, proposent des innovations notables dans le domaine du télétravail et du travail agile (« smart working »), favorisant ainsi une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle. 

Le rapport IGAS arrive à un moment où les attentes sociétales en matière de management n’ont jamais été aussi élevées. L’enjeu est clair : sans une réforme profonde des pratiques managériales, les entreprises françaises pourraient perdre en attractivité et en compétitivité. 

Pour les professionnels RH, ce rapport est une opportunité unique de repenser leur stratégie de formation et d’accompagnement de la ligne managériale, de s’inspirer de bonnes pratiques européennes et d’impulser une évolution culturelle majeure au sein de leurs organisations.